Les petites bêtises du marketing par Catherine Heurtebise

Catherine, après des années dans le journalisme, tu as publié Les Petites Bêtises Du Marketing : qu’est-ce qui a incité à rédiger un tel recueil ?

C’est Georges Lewi qui m’a proposé cette idée de faire un livre sur les flops marketing. Idée qui est tombée à pic puisqu’après mon départ de « Marketing Magazine », j’étais libre comme l’air (pour reprendre le titre du blog de mon amie et ex-associée Babette Leforestier) de pouvoir dire ce que je voulais, sans dépendre d’un média. Et aussi, personne ne parle des flops parce qu’en France, contrairement aux pays anglo-saxons, l’échec est tabou.

Quelle est ta bêtise préférée dans le marketing ?

Ma préférée est le plus flagrant qui illustre l’amnésie qui semble est l’échec de Nestfluid en 2010. Comment, après le flop de LCI de Chambourcy (entreprise rachetée le groupe), celui d’Essensis de son concurrent Danone, Nestlé a-t-il pu s’entêter sur les alicaments. C’est ce que j’appelle l’amnésie, une maladie qui touche toujours les directions générales et marketing

Et dans le domaine des études marketing ?

Je n’ai (malheureusement) pas parlé de bêtise d’études marketing car le domaine des études reste très secret, beaucoup plus que celui des « produits ». Mais à chaque (ou presque) lancement de produit grande consommation qui échoue, il y a un pré-test. Après, on le sait, l’échec tient en général à un « go » ou « no go » dont la décision relève plus de l’annonceur que de l’institut d’études. La probabilité de succès d’un produit relève d’une analyse approfondie et mature de la performance commerciale, souvent un point faible des organisations.

Le 21 Janvier, tu seras keynote à la Journée des Etudes : quel est ton regard sur ce marché que tu suis depuis de longues années ?

Mon message principal est de lutter contre ce culte du secret envers les échecs qui règne encore dans notre pays. Alors que plus de la moitié des innovations en grande consommation finissent aux oubliettes. Et ces flops ne concernent pas uniquement les « produits » marketés mais aussi des distributeurs, des médias, des médicaments, des publicités, des tweets, des pseudo-innovations de l’Etat ou d’institutions publiques… On apprend bien sûr en se trompant Ensuite, je plaide pour la sincérité. Ce qui déclenche le flop, c’est en effet une fausse promesse. Les consommateurs sont de plus en plus adultes et si votre offre n’est honnête, si elle ne leur apporte rien, ils vont la refuser. Pourquoi les managers ne se posent pas la question simple : qu’est-ce que mon innovation va apporter au consommateur. Mais voilà, comme en politique, chacun veut marquer son règne : c’est moi qui suis à l’origine du nouveau produit X, qui a révolutionné le marché des lessives ou des sodas… Je cite cette phrase Marcel Proust : « il n’y a pas de réussites faciles ni d’échecs définitifs ». Osons nous tromper mais en restant honnête. Pas simple !

Ensuite, il faut pouvoir parler et rire de (presque) tout, surtout quand les pros du marketing veulent nous surprendre avec leurs fausses innovations. D’autant plus, qu’avec les bad buzz, on rit (parfois jaune) de plus en plus….Enfin, sur les études en particulier, il faut que, de plus en plus, elles servent à quelque chose. Beaucoup de progrès sur ce point ont déjà été effectués, poussés par les réductions budgétaires et la concurrence en termes d’offres des spécialistes et de méthodes. Avec la maturité des attentes des consommateurs et celle des marketers, on fait moins d’études « alibi ». Mais il faut poursuivre les efforts car on voit encore certaines dérives…. Respect du consommateur, transparence… Des mots qui doivent être en tête des préoccupations.

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