Le très sérieux New York Times a recensé quelques 250 insultes utilisées par Donald Trump en un an sur Twitter : le réseau social est devenu en quelques mois son moyen de communication favori pour vider sa bile, et tout le monde en prend pour son grade, de ses adversaires démocrates (Hillary Clinton et Bernie Sanders) aux républicains (Jeb Bush, Ted Cruz, des « perdants » ou John Kasich, un « raté »).
De nombreux analystes ont souligné l’aspect schizophrène de son discours, les tweets les plus violents alternant avec d’autres, plus modérés ; certains analystes se sont même interrogés sur la capacité d’un tel individu à diriger un pays comme les Etats Unis… et à détenir la clef de l’arme nucléaire par ailleurs. L’impression générale était que, sous la pression de ses conseillers, Trump réussissait à contenir sa hargne quelques heures durant… jusqu’au moment où, excédé, il la laissait l’emporter !
Une explication plus simple a été fournie (sur Twitter également, bien sûr) par Todd Vaziri, le responsable des effets spéciaux de nombreux films à Hollywood – et donc en aucun cas un universitaire ou un journaliste politique : « Every non-hyperbolic tweet is from iPhone (his staff). Every hyperbolic tweet is from Android (from him) ». Bref, les insultes, c’est Trump lui-même qui les publie ; les autres, plus policés, viennent de son équipe !
Rassurons-nous donc : Donald Trump n’est ni schizophrène, ni bipolaire : juste violent, outrancier, raciste, grossier…
Le data scientist David Robinson a approfondi l’analyse en soulignant que Trump se lâche sur le réseau social tôt le matin, ou tard le soir : le reste de la journée, son équipe tente, sinon de réparer les dégâts, du moins de faire son job de responsable de la communication d’un candidat à la Maison Blanche.
Ce cas extrême n’est pourtant pas isolé : en France également, bon nombre d’hommes politiques partagent l’animation de leurs comptes sur les médias sociaux avec leurs équipes ; quand la communication s’effectue de manière harmonieuse, personne s’y trouve à redire – surtout si tout le monde utilise le même type de Smartphone !
Pareil pour les marques où des équipes de community managers se relaient pour assurer la continuité du service ; en SAV pourtant, de plus en plus souvent, les collaborateurs personnalisent leurs actions en signant leurs messages de leurs initiales : ici, le besoin d’humain s’impose. Question : où se situe la frontière entre un discours institutionnel totalement dépersonnalisé – voire personnalisé par des égéries – et la relation clients, nécessairement plus incarnée ?
La question devient encore plus pressante en B2B, entre le discours institutionnel – toujours édulcoré, voire froid – et celui de dirigeants qui soignent leur personal branding : la rapidité peut conduire à bien des dérapages.
En termes marketing, toute communication sur les réseaux sociaux nécessite la mise en place d’une ligne rédactionnelle – en lien direct avec la plateforme de marque, bien entendu.
En termes d’études marketing, l’analyse du discours revient en force, et doit s’intégrer avec d’autres compétences, telles que la sociologie ou l’ethnologie : Twitter, Facebook et autres Snapchat ne bouleversent pas que les habitudes des consommateurs et des citoyens ; ils obligent les gens de marketing à se réinventer chaque jour.