Études de marché : sortir d’un environnement trop homogène !

Mis face à leurs responsabilités – et surtout à leurs erreurs d’appréciation – après l’élection surprise de Donald Trump, les médias américains se sont fustigés à coups d’autocritiques diverses et variées ; surtout il leur fallut répondre aux interrogations et aux reproches de leurs lecteurs.

« S’il vous plait, descendez de votre gratte-ciel new-yorkais et joignez-vous au reste d’entre nous », les apostrophait ainsi un certain Nick, un abonné du New-York Times.

Leur première erreur fut certainement d’avoir accordé une confiance aveugle aux multiples sondages donnant Clinton en tête… ce qui s’est d’ailleurs concrétisé dans les urnes, la démocrate ayant remporté, et de loin, le vote populaire.

Mais le système américain étant à deux niveaux, les citoyens élisant de grands électeurs, c’est certainement des échantillons de 1000 par état qu’il aurait fallu suivre en permanence – soit 50 fois 1000 pour une marge d’erreur acceptable : ça coûte cher.

Un autre problème méthodologique réside dans la nécessaire extrapolation : en matière politique, les gens ne se montrent pas toujours honnêtes – d’ailleurs, le sont-ils avec eux-mêmes ? Et comme le phénomène Trump apparaît sans précédent, sur quelles bases effectuer les nécessaires redressements ? La France a connu pareil problème en 2002.

Quoi qu’il en soit, ce que reprochait Nick est beaucoup plus profond : les journalistes – et notamment ceux des grandes rédactions, ceux qui « font l’opinion » – vivent dans un écosystème particulier : même en envoyant des reporters sur le terrain, leurs raisonnements, leurs valeurs sont ceux d’un groupe social bien particulier.

On reproche souvent aux politiques de vivre complètement coupés des réalités – du peuple qu’ils sont censés représenter ; mais nous vivons tous dans pareilles petites bulles : les gens que nous fréquentons, tant dans nos vies professionnelle que privée, nous ressemblent beaucoup.

Les chercheurs de l’école de Palo Alto nous enseignent que nous vivons tous dans des systèmes homogènes, certes ouverts… mais finalement pas tant que cela, malgré tout !

C’est pourquoi les ingénieurs se montrent souvent si déçus quand les consommateurs ne plébiscitent pas leurs super inventions : c’est même pour remédier à de telles erreurs d’appréhension qu’est né le marketing de la demande, qui va confronter leurs trouvailles aux attentes des clients ; ainsi sont nées les études de marché.

Lire attentivement un rapport d’étude permet de mieux appréhender « rationnellement » les consommateurs, et d’éviter de graves erreurs ; toutefois, il ne réduit pas la barrière culturelle – il ne crée aucune empathie entre les marketers et leurs clients… et parfois, cela ne suffit pas.

Procter & Gamble a le premier franchi le pas il y a quelques années en envoyant ses équipes marketing rendre visite à de simples utilisateurs de ses marques à leur domicile : expérience enrichissante, même si difficile à organiser.

Mais la première étape ne serait-elle pas d’assister, derrière le miroir sans tain, aux diverses réunions de groupe où de parfaits inconnus parlent avec passion de ses produits ?

Pas le passage en coup de vent, où l’on écoute d’une oreille distraite quelques réparties avant de se sauver pour un diner en ville.

Pas non plus la saisie quasi in extenso des verbatim, que l’on écoute au premier degré, sans le recul nécessaire qui évite bien des contresens.

Non, l’écoute attentive, bienveillante, qui permet de mieux s’immerger au sein de groupes sociaux auxquels on n’appartient pas : cela ne coûte qu’un peu de temps et enrichit considérablement son expérience.

 

 

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