La naissance des sciences cognitives

La naissance des sciences cognitives. En 1861, « Monsieur Tan-Tan » – Leborgne de son vrai nom – décède à l’hôpital Bicêtre ; son surnom, il le doit à une aphasie qui l’empêche de prononcer autre-chose que cette unique syllabe « tan » répétée le plus souvent deux fois de suite.

Paul Broca, chirurgien et anthropologue français, autopsie son cerveau et constate une dégénérescence au nouveau de son lobe frontal gauche : il associe cette zone du cerveau – cerveau encore aujourd’hui visible à Paris, au musée Dupuytren, en photo ci-contre – au trouble du langage de son patient, que l’on nommera par la suite « aire de Broca ».

20 ans plus tard, Carl Wernicke pratique semblable autopsie sur le cerveau d’un patient atteint d’une autre d’aphasie l’amenant à ne prononcer que des suites de mots sans réelle signification comme « Boutique à manger rue sur un chandelier de cuivre ou bien ».

ln constatera une importante lésion au niveau du gyrus temporal supérieur postérieur, qu’il considérera comme responsable de ces troubles du langage – et qui prendra le nom d’« aire de Wernicke ».

Les sciences cognitives étaient nées… dans la douleur, reconnaissons-le.

On pourrait également citer les mésaventures de Phineas Gage, ce contremaître des chemins de fer américains qui eut la tête partiellement fracassée par une barre à mine … en survécut certes, mais avec des troubles du comportements qu’évoquera Antonio Damasio dans L’erreur de Descartes.

A chaque zone de notre cerveau correspondent une ou plusieurs fonctions : aujourd’hui, l’imagerie par résonance magnétique – ou IRM – nous permet de les identifier de manière moins intrusive.

Chacun d’entre vous a déjà fait l’expérience du numéro de digicode qui change : les premiers jours, on apprend par cœur le nouveau, que l’on « récite » dans sa tête avant de le taper en rentrant le soir. Puis arrive le moment où l’on agit automatiquement…

Et quand on nous demande ce code que quelque temps auparavant on donnait immédiatement… on hésite : on ne le sait plus, on est obligé de s’imaginer devant sa porte en train de le taper !

Notre mémoire n’est pas unique : en réalité, nous disposons de différentes formes de mémoires, logées en différents endroits de notre cerveau.

La mémoire sémantique par exemple, celle de ce que l’on apprend, à l’école par exemple – « 2 fois 2 = 4 » –, mais aussi parce que la publicité nous le rabâche sans cesse – d’où la recherche par les média-planneurs de la répétition idéale ; la mémoire sémantique est une mémoire déclarative : quand on nous pose la question : « 2 fois 2 ? », on peut répondre « 4 ».

La mémoire procédurale, elle, n’est pas déclarative : je « sais » renseigner le digicode mais je « ne sais pas » dire ce que je fais ! Je n’ai évidemment pas oublié le chiffre fatidique – sinon, je ne pourrais pas rentrer chez moi – mais je ne suis plus capable de le donner.

Des études par IRM ont montré que ce n’était pas la même zone du cerveau qui s’activait quand on apprenait une information ou la restituait – donc que l’on faisait appel à sa mémoire sémantique – et quand on effectuait une action automatique – liée à la mémoire procédurale : les données semblaient migrer d’une partie du cerveau à une autre.

Conclusion évidente pour les études marketing : inutile de chercher des informations… où elle ne sont pas ! Inutile de demander à des consommateurs de nous renseigner sur des actions qu’ils effectuent automatiquement : ils en sont incapables – par contre, on peut les observer…

Il existent bien d’autres mémoires que sémantique et procédurale : immédiate, travail, à long terme, mémoire épisodique également, celle des événements vécus avec leur contexte.

A nous d’adapter nos outils d’études à cette diversité.

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